" Une peinture de genre peut revêtir une saveur passée et désuète en apparence " |
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En voilà des manières !
Si une peinture de genre, encore appelée scène de genre, est la restitution d’une scène présente saisie sur l’instant, il ne faut pas oublier que notre mémoire réactualise sans cesse ce qui nous a marqués enfant. Et surtout lors de la période préverbale. L’inconscient enregistre et garde à distance tout ce qui nous a gênés, perturbés, voire traumatisés… Une peinture de genre peut alors revêtir une saveur passée et désuète en apparence et, pour autant, continuer à marquer les esprits des siècles après que l’œuvre d’art ait été réalisée. Entre autres preuves, la célèbre Joconde… Prenons un autre exemple : en 1912, Erich Heckel – le talentueux peintre et graveur allemand – peint Deux hommes autour d’une table. Un Français peut aujourd’hui envisager, en pénétrant cette sublime toile, que la scène se situe pendant la seconde guerre mondiale et que la folie d’Hitler s’exprime avec l’horreur qu’on lui connaît maintenant. Tout se trouve (déjà ?) dans cette peinture : le double psychotique et son clivage du moi, l’impuissance humaine et la représentation d’une femme décharnée et déportée… Pourtant ce tableau – encore une fois – a été réalisé en 1912 ! Tout aussi curieux qu’en 1944, bien triste année s’il en est, Fernand Léger « exécute » Les Grands Plongeurs noirs : les « Sans papiers » allaient être baptisés ainsi, de façon un peu méprisante, quelques décennies plus loin… La liste est longue d’autant d’intuition et de restitution récurrente du drame humain. C’est aussi en 1965 que David Hockney peint une œuvre magistrale : Deux garçons dans une piscine. Ceux-ci sortent d’une piscine, a priori privée, nus ; un seul transat (pour deux ?) est posé sur la gazon. S’agit-il d’une sorte de naissance de frères jumeaux ou d’un couple homosexuel ? Il y a donc plus de 40 ans que cette toile existe mais elle reste très actuelle… On peut, de facto, en faire une exégèse… d’actualité… Le sida n’était pas encore la maladie d’amour et pourtant, on peut très bien envisager que le pinceau d’Hockney l’annonce à sa manière. Effectivement, si l’on regarde bien les remous occasionnés par les deux baigneurs (voilà encore un terme bien ambivalent !), on constate un imbroglio d’entrelacements phalliques dans cette eau bleutée, entrelacements situés derrière les deux hommes, leur postérieur dénudé étant visible à l’œil nu… Il y a quelque chose de l’ordre de l’expression d’un piège fatal dans cette peinture. Il est curieux que ce peintre et dessinateur anglais ait d’ailleurs la réputation de représenter ses personnages dans un univers « aseptisé »… Ainsi, le Tout serait-il dans l’œuvre artistique, hypothèse qui en fait – quoi qu’il en soit – une autre manière d’envisager le monde, la vie, l’avenir…
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